/fdata%2F0530425%2Favatar-blog-6255758-tmpphp40lVAP.jpg){kind=avatar}
SEMAINE DU 22 AU 28 NOVEMBRE 2008
Si peu séduisant et pourtant...
Quinze ans que Federico Fellini a tiré
son chapeau : Arte nous permet de revoir le Casanova du génial réalisateur italien, lundi soir 24 novembre à partir de 21 heures. Un bel hommage rendu à celui qui ne
craignait qu'une chose après sa mort : ériger une statue à son effigie sur une place de Rome pour que les pigeons viennent déféquer dessus.
Quand l'un des plus grands cinéastes italiens affronte l'un des mythes littéraires les plus établis, le projet sent déjà l'odeur
du souffre et aiguise la curiosité. En 1976, à la demande de producteurs américains, Il Casanova di Federico Fellini (titre original qui permet de mieux comprendre comment le
réalisateur a d'emblée renié toute forme de reconstitution historique et a voulu prendre ses distances avec un hommage poudré au prétendu plus grand séducteur de tous les temps) sort sur les
écrans, après plusieurs annnées de travail acharné dans les studios de Cinecittà. Pour ceux qui s'attendaient à voir un Casanova tombeur et charmeur, c'est la désillusion. Fellini avait trop le
sens du contre pied pour ne pas jeter une pierre au jardin de l'archétype du séducteur italien. C'est d'ailleurs à un acteur non transalpin que fut confié le rôle principal, Donald Sutherland,
qui manifestement à cette période avait "séduit" les réalisateurs italiens et semblait les fasciner avec un jeu exprimant une profonde laideur d'âme (voir à la même date la fresque
historique de B. Bertolucci Novecento où l'acteur campe un odieux fasciste). Imaginez Casanova dans un film italien joué par un Canadien ! Mais Fellini est allé encore plus
loin dans la volonté de démystifier son personnage. Le site d'Arte nous rapporte ses objectifs avant de débuter le tournage : "Casanova est un personnage ridicule, tout au plus tragi-comique.
Je veux le démasquer. Il est l’éternel jeune garçon qui ne devient jamais adulte. Casanova est pour moi le type de l’italien immature, du Papagallo, du bourreau des cœurs, de l’homme à femmes
qui, en vérité, n’est que le petit garçon gâté de sa maman, qui refuse toute responsabilité et qui vit en s’imaginant tranquillement que tout doit venir d’en haut : de maman, du roi, du Duce, de
la Sainte Vierge. Un homme qui est le prisonnier de ses mythes – et donc aussi du mythe d’être un bourreau des cœurs."
Quant à l'intrigue, si elle évoque les conquêtes féminines de ce collectionneur, elle s'échappe très vite dans les fantamasgories du réalisateur, qui loin de montrer la beauté de ce Casanova, en fait un pitoyable et méprisable être condamné à errer sans fin et dans les lieux les plus improbables tels que l'intestin d'une baleine ou une mer de sacs plastiques (voir la photo plus haut). Le film n'est pas d'un abord très facile et supporte mal la diffusion sur petit écran qui occulte la magnificience et la recherche des décors, dus notamment en partie au très grand Roland Topor. Mais le spectacle vaut le coup d'oeil car à l'heure où le cinéma se complait dans des adaptations littéraires lourdingues, le Casanova de Federico Fellini montre que l'oeuvre d'art n'est jamais répétition mais perpétuelle re-création.
