SEMAINE DU 19 AU 25 OCTOBRE
Marche arrière
Il faut saluer le courage d'Arte d'oser diffuser en début de soirée (à partir de 20 heures 45, lundi 21 octobre), un film aussi dérangeant que déconcertant, avec Ne vous retournez pas ! de Nicholas Roeg, tourné en 1974. Un avertissement que le spectateur devrait peut-être prendre au pied de la lettre...
Cinéaste peu connu du grand public, l'Anglais Nicholas Roeg présente une filmographie relativement resserrée mais d'une très grande originalité. La preuve nous en sera fournie ce lundi avec Arte, qui a fait le choix audacieux de diffuser Ne vous retournez pas !, film que le Festival des 7 collines de Saint-Etienne avait pris, lui aussi, le risque de diffuser en plein air il y a quelques années.
Proche du genre fantastique, le film raconte l'histoire d'un couple d'Anglais, Laura et John Baxter (interprétés par deux acteurs essentiels des seventies : Julie Christie et Donald Sutherland) en séjour à Venise peu après la mort accidentelle de leur fillette, noyée. Dans un lieu souvent présenté comme idyllique pour les amoureux, ces derniers doivent affronter leurs démoins et sont victimes de visions ou d'étranges rencontres, plus ou moins fantasmagoriques, qui viennent leur rappeler le poids douloureux du souvenir et le fardeau du deuil.
Ainsi présenté, le film n'a pas, de prime abord, de quoi attirer une foule de spectateurs, soucieux qui plus est, d'entamer leurs vacances scolaires avec un peu de détente. Car de répit, il n'y aura pas pour les Baxter... et par conséquent, pour les spectateurs. Croisant plusieurs genres (le drame sentimental, le thriller car l'arrivée du couple correspond aussi à une vague de meurtres d'une rare violence dans la cité des Doges, le fantastique avec les réapparitions dramatiques de l'enfant décédée), Ne vous retournez pas ! a tout les ingrédients du film atypique. Il semble, en effet, utiliser pour mieux les confondre les codes du cinéma anglo-saxon (avec son réalisateur, ses interprètes, mais aussi sa photographie) avec ceux du cinéma transalpin, du fait de ses références marquées au giallo, genre très en vague à cette époque mêlant souvent dans un déluge de sang traque d'un meurtrier sadique avec passages oniriques, genre que Mario Bava et Dario Argento portèrent à son firmament (voir l'indépassable Les Frissons de l'angoisse du dernier nommé).
Ainsi, il sera profitable aux cinéphiles ou aux curieux du cinéma de découvrir cette pépite de Nicholas Roeg, afin, à l'instar de ce que suggère son titre, de ne pas avoir de regrets.