SEMAINE DU 13 AU 19 JUIN
Lucien, nous voilà !
Le début des années 70 ont vu, bien après certains travaux universitaires, l'opinion publique française redécouvrir la face trouble de son passé lors de la Seconde Guerre Mondiale. France 2 diffuse dans la nuit du 16 au 17 juin, le film qui fit en son temps polémique de Louis Malle, Lacombe Lucien ou l'histoire d'un adolescent attiré en 1944 par le côté obscur... de l'occupation nazie.
Dans un souci apparent d'équilibre, France 2, qui nous avait proposé la semaine dernière La bataille du rail, nous plonge au coeur de la collaboration avec
le film de Louis Malle, Lacombe Lucien (1974). Comme la semaine dernière, le film sera diffusé dans la nuit du mardi 16 au mercredi 17 juin vers 0 heure 15. Le scénario co-écrit
par le réalisateur et Patrick Modiano nous présente la trajectoire singulière d'un jeune adolescent frustré vers la collaboration. L'action se déroule au moment de la Libération du territoire
français, en juin 1944, dans le Sud-Ouest de la France. Fils de paysans, Lucien Lacombe (Pierre Blaise) fait des ménages dans un hospice. Ne pouvant rester chez lui,
il tente de rejoindre le maquis, mais est refusé par l'instituteur qui le commande. Un concours de circonstances le conduit dans les locaux des auxiliaires français de la police
allemand qui soutirent facilement le nom du responsable du maquis. Lucien Lacombe, s'en trop en mesurer les tenants et les aboutissants, se retrouve alors embrigadé dans la police allemande.
C'est l'occasion rêvée pour lui de profiter d'une forme d'autorité qui lui échappait. Il rencontre Albert Horn, un tailleur juif caché dans la région, et profite de son nouveau
statut pour s'installer chez lui et séduire sa fille, France (Aurore Clément).
En son temps, Lacombe Lucien avait défrayé la chronique, car on y montrait la
face longtemps refoulée de l'attitude d'un certain nombre de Français pendant la seconde guerre mondiale. De fait, la production cinématographique au début des années 70 brisait un
relatif tabou en offrant à l'opinion publique l'envers de la médaille d'une France 100% résistante. Marcel Ophuls acheva en 1971 un très long documentaire intitulé Le Chagrin et la Pitié
montrant comment les habitants de Clermont-Ferrand s'accomodèrent bon an, mal an, de l'occupation allemande. On accusa Louis Malle d'avoir banalisé l'attitude de son héros qui tombe "par hasard"
du mauvais côté, sans réelle motivation idéologique et d'avoir en quelque sorte excusé son engagement du côté des forces collaboratrices. Certes, le film est habilement construit et met savamment
en place pendant un premier temps tous les facteurs qui vont conduire Lucien Lacombe à s'engager pour une mauvaise cause (absence du père, frustration intellectuelle et sociale...). Mais,
aujourd'hui la polémique paraît bien vaine et le film, en évitant la dénonciation facile, rappelle, ce que le grand cinéaste allemand, Fritz Lang, n'a cessé de démontrer dans sa filmographie,
qu'entre le bien et le mal, il y a parfois moins que l'épaisseur d'un boyau de pneu de vélo !